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Global Atomic dans le trouble au Niger

La junior canadienne Global Atomic devait commencer à produire de l'uranium dans le cadre de son projet Dasa au Niger en 2025 à hauteur d'environ 2,000 tonnes par an, avant que le coup d'État militaire du 26 juillet ne remette ce projet en question... entre fermeture des frontières, changement d'interlocuteurs, incertitudes politiques et plus récemment la position américaine sur le Niger, Global Atomic fait face à quelques enjeux qui semblent troubler les investisseurs.


Lancement sur des chapeaux de roue

Pourtant tout avait "bien" commencé pour Global Atomic avec son projet Dasa au Niger. En aout 2022, l'entreprise canadienne formait avec l’État nigérien une première joint-venture, la SOMIDA, pierre indispensable pour espérer exploiter le gisement d'uranium. Les canadiens avaient alors choisi pour diriger cette coentreprise un habitué des projets miniers d'uranium en la personne de Moussa Souley, ancien directeur général de la mine souterraine de COMINAK, une filiale du groupe français d'énergie nucléaire Orano, située à 100 km au nord du projet Dasa. Dès novembre 2022, la SOMIDA lançait alors les premiers travaux d’ingénierie, d’approvisionnement et de gestion de la construction (EPCM) confiés à la filiale canadienne Lycopodium Mineral et la conception de l'usine de traitement de Dasa à l'entreprise indienne Development Consultants Private Limited (DCPL).


Projet Dasa, Niger. Photo : Resource World Magazine

En janvier puis en mai 2023, l'entreprise canadienne avait déjà conclu des accords de vente d'uranium auprès d'entreprises nord-américaines sur un marché en forte demande, représentant un potentiel de revenus de plus de 250 millions de dollars USD. Enfin, en octobre dernier, l'entreprise canadienne a signé une lettre d'intention présentant un approvisionnement jusqu'à 1,750 tonnes de U3O8 dans une fenêtre de livraison pluriannuelle débutant en 2026. Le total des achats contractés représenterait maintenant environ 30 % de la production initiale prévue sur les cinq premières années de Dasa. Le potentiel de revenus de ces 3 contrats représenterait ainsi environ 500 millions de dollars USD.



Le 27 juillet, début des ennuis

Et pourtant un événement majeur allait venir perturber cette lancée fulgurante de l'entreprise dirigée par Stephen Roman. Le 26 juillet, aux alentours de 23h30, l’armée nigérienne annonce la création d’un Conseil National de Sauvegarde de la Patrie (CNSP), avoir suspendu la Constitution et instauré un couvre-feu. Les frontières sont également fermées jusqu’à nouvel ordre. Le chef de la garde présidentielle Abdourahmane Tchiani déclare avoir pris le pouvoir.


Un changement de pouvoir au sommet de la pyramide politique est souvent synonyme d'une incertitude pour les entreprises opérants dans le pays et une montée en tension pour les investisseurs qui voient leur argent pris en otage dans des jeux politiques. C'est aussi le début des ennuis pour Global Atomic dont le CEO déclare dans une interview donnée en septembre 2023 : "La réorganisation politique au Niger a créé des frustrations pour la compagnie" bien qu'il assure que "les opérations se déroulent normalement. Nous avons rencontré le ministre des mines et le nouveau gouverneur de la région, qui soutiennent pleinement le projet. Ils souhaitent que nous poursuivions nos activités sans relâche."


Rassurant, mais sur le terrain, la réalité pose quelques enjeux importants pour Global Atomic. En effet, la CEDEO qui ne cautionne pas pantoute cette prise de pouvoir, a décidé en accords avec les pays limitrophes, en particulier le Bénin, de fermer les frontières terrestres et aéroportuaires. Les lignes d'approvisionnement sont donc coupées. Écueil important pour l'extraction minière l'entreprise qui a besoin de produits venus de l’extérieur pour fonctionner : des trépans de forages pour les foreuses jumbo ou encore des boulons pour les roches. Et tout ça est acheminé par le port de Cotonou. De plus, Global Atomic est en cours de construction de l'usine de traitement ce qui requiert la venue de consultants expatriés. Stephen Roman l'annonce : "Cela va constituer un gros obstacle, et c'est pourquoi nous disons que le projet pourrait être retardé. Nous l'avons dit au gouvernement, nous avons dit au ministre des mines que les choses doivent s'ouvrir, sinon le projet sera retardé."


L'entreprise semble cependant avoir trouvé une solution en passant par le Ghana et le Togo et à travers le Burkina Faso, autre pays ébranlé par un récent coup d’État. A ce moment là pourtant, l'ancien Conseiller politique du Ministre de la Défense Nationale canadienne n'est pas encore au bout de ses peines.


Le coup d’État américain

Le 10 octobre 2023, le porte parole du US Department of State, Matthew Miller, déclare : "les États-Unis ont conclu qu’un coup d’État militaire a eu lieu au Niger. [...] Les États-Unis suspendent la majeure partie de leur aide au gouvernement du Niger. Le 5 août, les États-Unis ont temporairement suspendu certains programmes d’aide extérieure au gouvernement du Niger, d’un montant total de près de 200 millions de dollars. Nous prenons également note de la suspension par le Millennium Challenge Corporation (MCC) [agence bilatérale d'aide étrangère des États-Unis] de toute assistance au Niger, y compris de tous les travaux préparatoires relatifs à l’accord de transport régional, Niger Regional Transportation Compact, d’un montant de 302 millions de dollars, et de toutes les nouvelles activités relatives à l’accord de 2018.'


Cette déclaration a des impacts importants sur le Niger notamment sur les liens de coopération économique entre les deux pays. Pour Global Atomic aussi c'est un problème majeur. En effet, l'entreprise canadienne est en partie financée par une facilité de paiement sur dette par la U.S. Development Bank, or en raison de la qualification de coup d’État par l'Administration Américaine, la banque a mis son financement sur pause.


Nouveau code minier, quel horizon ?

Ces nouvelles ne sont pas des plus positives. Et d'autres incertitudes continuent de peser sur les contrats de Global Atomic. L’activité économique de l'entreprise est encore régie par l'ancien code minier et conventions minières. D’après l'entreprise les conventions minières existantes de Global Atomic garantiraient la stabilité des droits, taxes, redevances et avantages fiscaux tels qu'ils existaient au moment où la convention minière a été conclue.

Or, le 5 juillet 2022, le Président de la République du Niger a promulgué un nouveau Code minier, soit avant le coup d’état. Ainsi, les taux de redevances minières en vertu de l'ancien code minier et de la convention minière sont basés sur un taux de 5,5 % à 12 % des revenus, en fonction des marges bénéficiaires. En vertu du nouveau code minier, le taux de redevance sur l'extraction de l'uranium est fixé à 7%. La convention minière qui régie les activités de la SOMIDA devrait expirée en octobre 2027. Et si le nouvel État en décidait autrement ? Si le nouveau code minier s'appliquait a l'entreprise canadienne, quels changement pour le modèle économique de Global Atomic ? Que dira Mahaman Moustapha Barké, nouveau ministre des mines ?


Sur les 6 derniers mois, la valeur mobilière de Global Atomic a perdu 26% à la bourse de Toronto, autour de 2,80$CAD avant le coup d’État à environ 2$CAD par action en octobre. Global Atomic se veut rassurant : "l'entreprise a assez de cash pour les 12 prochains mois". Stephen Roman devra donc continuer de se montrer confiant auprès des investisseurs et diplomate auprès des interlocuteurs politiques.


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